Physiologie musculaire du cheval

Physiologie musculaire du cheval

Avant d'aborder la nutrition équine, il convient d'abord de s'intéresser au fonctionnement de l'organisme. La compréhension des particularités digestives, de la croissance du poulain ou encore, de la physiologie musculaire du cheval, est un pré-requis indispensable à l'élaboration d'une ration équilibrée.

Physiologie musculaire

Coupe transversale d'un faisceau de muscle de cheval préparé par une technique de coloration.

Organisation musculaire détaillée

Organisation musculaire détaillée

Fibres de Type I

Grande faculté à utiliser l’oxygène (aérobie).
Leur rendement énergétique est bon : La combustion des substrats (lipides) est complète, sans déchet.

L’utilisation préférentielle des lipides entraîne une épargne des glucides, ce qui leur confère une forte aptitude à prolonger l’effort. Ces fibres sont peu fatigables mais leur vitesse de contraction est lente, ce qui limite l’intensité du travail fourni. Ainsi, elles sont utilisées en priorité au pas et sont propices à l’effort d’endurance.

Fibres de Type IIa

Elles sont intermédiaires car elles se contractent rapidement mais sont assez économes en glycogène* (bon métabolisme aérobie). La combustion des glucides est quasi complète, sans accumulation d’acide lactique.
*Glycogène (ou glucose) : produit de l’énergie de façon aérobie deux fois plus rapidement que les lipides. Il est préférentiellement utilisé quand la vitesse augmente.

Leur rendement énergétique est excellent (pertes thermiques modérées). Elles sont favorables aux efforts intenses prolongés, tel le sprint long.

Ces fibres sont responsables de la tenue de la vitesse (ou résistance) et sont d’une importance primordiale chez le pur-sang anglais et le trotteur français qui parcourent des distances classiques de 2 500 mètres environ.

Fibres de Type IIb

La combustion des glucides se fait en quantité importante mais en l’absence quasi totale d’oxygène (anaérobie). Du coup, elle est incomplète et entraîne la production d’acide lactique qui s’accumule dans les cellules musculaires.

Leur rendement énergétique est donc médiocre (pertes thermiques importantes).

Cependant, étant donné que ces fibres sont les plus grosses et qu’elles possèdent une vitesse de contraction très rapide, elles sont favorables à l’effort de puissance et au sprint court. Ces fibres sont en grande partie responsables de la vitesse innée et sont déterminantes chez le quarter horse effectuant des courses de 400 mètres.

3 chevaux, 3 allures

Travail musculaire en fonction de l'allure

Au pas

  • Les muscles se contractent très lentement. Les fibres I sont recrutées en priorité et génèrent de l'énergie uniquement par la voie aérobie.
  • À cette vitesse, les muscles brûlent principalement des graisses. Leurs réserves étant abondantes, leur mobilisation et leur métabolisation étant assez rapides, elles suffisent à régénérer l'énergie consommée pendant la marche.

Conséquences pratiques

Apporter des lipides aux chevaux entraînés au pas rapide (chevaux d'endurance).
Le pas rapide est intéressant pour faire reprendre l'entraînement à un cheval en surcharge pondérale. Il est également bénéfique du point de vue du système ostéo-articulaire non sollicité depuis un moment.

Au trot et au galop

    • Les fibres I seules ne peuvent se contracter assez rapidement pour propulser le cheval. Les fibres IIa sont alors recrutées. Ces dernières utilisent majoritairement la voie aérobie et un mélange de glycogène* et de graisses pour générer de l’énergie.

Conséquences pratiques

Apporter des glucides dans la ration particulièrement sous forme d’amidon :
« Il s’agit d’une source énergétique de choix pour la synthèse de glycogène car sa digestion entraîne une augmentation de la glycémie et de l’insulinémie, deux des paramètres les plus importants impliqués dans la synthèse de glycogène » (Pagan et al., 1998).

Apporter une part de lipides dans la ration qui seront principalement utilisés les jours de « promenade » (vitesse lente à modérée). Ils permettent d’épargner en partie la réserve de glycogène musculaire pour les jours de travail intense.

Au trot ou au galop très rapide (sprint)

    • Les fibres IIb sont également recrutées. À cette vitesse, l’énergie n’est plus uniquement produite par la voie aérobie. Seule la combustion importante des glucides en l’absence d’oxygène (glycolyse anaérobie) permet de générer suffisamment d’énergie pour maintenir cette vitesse.
    • Inconvénient : la production et l'accumulation d’acide lactique font chuter le pH intramusculaire, qui sera responsable de l’apparition de la fatigue musculaire.

Conséquences pratiques

Importance de l’amidon dans la ration qui représente une source de choix pour la synthèse de glycogène.

Cheval d'endurance

Travail musculaire en fonction de la discipline

Notion de seuil anaérobie

Effort d'endurance (12-19 km/h)

Faible utilisation du glycogène musculaire par minute = le restant d’énergie nécessaire produit par l’oxydation des graisses.

Effort plus rapide

Quand la vitesse augmente, l’utilisation du glycogène musculaire augmente également.

À partir d’une certaine vitesse (cf. courbe ci-dessous), la production d’énergie ne peut plus être majoritairement assurée par la voie aérobie : le cheval atteint alors son « seuil anaérobie » (ou seuil de fatigue).

À partir de ce point, la voie anaérobie prend une part importante dans la production d’énergie, d’où l’augmentation exponentielle de l’utilisation du glycogène et de l’accumulation d’acide lactique : le cheval entre alors dans la « zone rouge ».
Au delà, la fatigue musculaire se fait sentir rapidement : l’effort ne peut alors se poursuivre longtemps.

L’augmentation brutale de la consommation du glycogène est causée par le recrutement de la voie anaérobie qui l’utilise avec un rendement énergétique 12 fois inférieur à celui de la voie aérobie. Il en résulte la production d’un déchet responsable de l’apparition de la fatigue musculaire : l’acide lactique.

Utilisation du glycogène musculaire

Interprétation de la courbe (d'après Pagan, 1998)

Elle donne la quantité de glycogène musculaire utilisée par minute en fonction de la vitesse du cheval. Ces données ont été recueillies auprès de différentes races (moyenne).

Notez que tant que le cheval reste en dessous de 39 km / h (1’27’’ au kilomètre), très peu de glycogène est utilisé.
Cependant, plus la vitesse augmente, plus le cheval s’approche de son seuil anaérobie.
À partir de ce point, la consommation de glycogène augmente de façon exponentielle.

Cheval de course

    • Le seuil anaérobie est propre à chaque cheval.
      Plus le seuil anaérobie apparaît tardivement au cours de l’effort, meilleur est le cheval.
    • L’objectif de l’entraînement est de faire reculer ce seuil au maximum. Pour cela, il faut entraîner une conversion des fibres IIb en Iia, comme l’ont montré Essen et Lindholm (cf. tableau ci-dessous)

Niveau de performance / Type de Fibres II

Interprétation du tableau d'après Essen et Lindholm, 1985)

Les auteurs ont démontré que la performance de Trotteurs américains courant le plus souvent sur 1 600 mètres était corrélée à la répartition des fibres musculaires de type II.
En effet, les meilleurs chevaux de l’étude avaient une proportion plus importante de type IIa.



  • Les grands principes de l’entraînement sont les suivants :
    • Travailler l’endurance : exercices longs et lents qui améliorent l’efficacité cardio-respiratoire et biomécanique.
    • Accroître la capacité aérobie : travailler à des vitesses inférieures mais approchant le seuil anaérobie.
    • Renforcer la puissance aérobie (tenue, résistance) : travailler autour du seuil anaérobie.
    • Stimuler la puissance anaérobie ou tolérance à l’acide lactique : exercices courts et répétés (intervalles) qui dépassent plus ou moins largement le seuil anaérobie.

Cheval d'endurance

Les déplacements sont presque toujours maintenus par la voie aérobie. Parfois, la demande en énergie dépasse la capacité de production aérobie.
Exemple : montées et / ou accélérations sur des portions plus ou moins longues.
Le seuil anaérobie n’a donc pas la même importance que chez le cheval de course.

L’apparition de la fatigue est le plus souvent la conséquence d’un épuisement des réserves glycogéniques, d’où l’importance d’apporter suffisamment d’amidon dans la ration et d’utiliser des lipides qui permettront de préserver les réserves en glycogène.

Objectifs principaux de l’entraînement :

    • Augmenter l’efficacité de la voie aérobie, notamment en augmentant la part relative de fibres de type I, par des séances de travail longues et lentes (pas rapide, trotting).
    • Améliorer l’efficacité cardio-respiratoire et biomécanique et renforcer la solidité osseuse par des séances de travail à vitesse plus élevée (séances de galop) et / ou en dénivelé.