L'alimentation du cheval : mythes, réalités et contres-vérités

L'alimentation du cheval : mythes, réalités et contres-vérités

Stop à la désinformation ! On vous explique tout.


SOMMAIRE

MYTHE 1 : " Mon cheval est anémié, je dois le supplémenter en fer !"

MYTHE 2 : " Mon cheval a le foie ‘chargé’ !"

MYTHE 3 : " Le concentré contient trop d’amidon !"

MYTHE 4 : " À l'effort, plus de protéines!"

MYTHE 5 : " Ration de floconnés, cheval en bonne santé !"


MYTHE 1 -
Mon cheval est anémié, je dois le supplémenter en fer ! 

L’anémie se définit comme une diminution de la concentration d’hémoglobine en deçà d’un certain seuil physiologique (<11g/dl). Les différentes causes possibles sont : les hémorragies, la destruction des globules rouges, les défauts de production d’hémoglobine, les inflammations chroniques causées par un agent infectieux. Souvent, les chevaux sont alors supplémentés en fer, afin de traiter l’anémie.
Mais les études scientifiques le montrent, chez le cheval, l’apport de fortes doses en fer n’influe pas sur la teneur en hémoglobine, l’hématocrite ou le taux de fer sanguin.

Bien au contraire, l’excès est toxique, il peut amener le cheval à développer une baisse d’immunité, et accélérer l’usure métabolique de la vitamine E, prédisposant le cheval aux lésions musculaires, car le fer a un effet pro-oxydant !

Enfin, l’excès d’apport en fer contribue à une baisse d’absorption d’autres oligo-éléments, tels que le cuivre, le zinc ou le manganèse. Puis, le fourrage est généralement bien pourvu en fer (moyenne 525 mg /kg d’herbe déshydratée).
Chez un cheval qui consomme une quantité de foin suffisante, soit 1-2 kg de foin /100 kg de poids vif (10 kg de foin environ pour un cheval de 500 kg), les besoins en fer seront largement couverts (besoins de 40-50 mg /kg de matière sèche : un cheval de 500 kg ingère environ 10 kg de matière sèche par jour avec un régime riche en fourrages): ⚠️ une carence est donc exclue !

⏩ Consulter la fiche complète sur le Fer.

En revanche, ce qui est démontré est l’apport des nutriments suivants nécessaire à la production des globules rouges :

    • Oligo-éléments (notamment le cuivre) : privilégier une forme ‘chélatée’.
    • Vitamines (B2, B6, B9, B12 en particulier, vitamine C)
    • Protéines (contribuent à la synthèse de l’hémoglobine) : choisir une source protéique de qualité (tel le tourteau de soja) !
    • Anti-oxydants (vitamine E, sélénium) : ils contribuent à la protection des membranes.

EN RÉSUMÉ
L'apport excédentaire de fer est inutile, voire néfaste pour un cheval anémié ! Apporter des nutriments de qualité est essentiel !

MYTHE 2 -
Mon cheval a le foie ‘chargé’ !

Tout le monde connait ce cas de figure ! Souvent, la ration est incriminée. Mais est-ce vraiment possible ? Explications.

Une première explication à l’origine de ce mythe est : lorsqu’une prise de sang d’un cheval est faite et envoyée pour analyse au laboratoire, et que les paramètres ASAT (ou SGOT) (des enzymes peu spécifiques) montrent une élévation (modérée), il est assez facile d’affirmer que le foie est en cause, et par déduction, l’aliment que le cheval reçoit.
Or, les ASAT sont des enzymes présentes dans de nombreuses cellules ; on ne peut les incriminer de manière isolée. Il convient pour cela, avec le vétérinaire, de prendre en compte les autres enzymes musculaires et/ou hépatiques avant de tirer des conclusions sur un foie ‘chargé’ !
Puis, une élévation isolée des ASAT ou en association des CK (enzymes musculaires) peut aussi montrer une souffrance (mineure) plutôt musculaire !
De plus, il faut savoir que les laboratoires de référence traitent les échantillons sanguins à 30°C, alors que certains analyseurs dits ‘de terrain’ traitent les analyses sanguines à 37°C, ce qui entraînerait une augmentation de presque 50 % de certaines valeurs.

Il n’existe aucun traitement efficace, scientifiquement prouvé, pour lutter contre cette ‘charge’ hépatique, qui n’en n’est probablement pas une !

Qu’en est-il de l’apport protéique excédentaire et de la ‘charge’ du foie ?
Il existe une large tolérance pour les excès protéiques dans la ration. En effet, l’azote excédentaire est transformé en protéines microbiennes de bonne qualité par la flore du gros intestin, et ces dernières sont principalement absorbées sous forme d’ammoniac. Cet ammoniac (qui est toxique pour l’organisme) doit être transformé en urée par le foie. C’est bien le seul moment où le foie est ‘chargé’ : mais cela ne signifie pas pour autant que le foie a une insuffisance fonctionnelle !
Au contraire, si le foie produit de l’urée, il fonctionne bien ! Un défaut de production d’urée associé à une élévation des paramètres hépatiques seraient bien plus inquiétant !

Cependant, l’apport de protéines en excès doit être évité chez le cheval athlète. Nous y revenons dans le MYTHE N°4 ci-dessous !
Puis, la distribution de sources d’azote non protéiques telle la jeune herbe de printemps, doit également être limitée, dans la mesure où elle génère le même phénomène de production d’ammoniac et de transformation en urée par le foie.

⏩A lire aussi : Les effets d'une surconsommation de protéines chez le cheval.

Dans tous les cas de figures, côté nutrition et supplémentation, et notamment chez les chevaux athlètes, il convient de faire un point sur : l'abreuvement, la qualité et quantité du fourrage, la qualité et la quantité d’aliment distribuée, et sur les électrolytes. Et lors de troubles musculaires avérés; supplémenter le cheval en vitamine E naturelle.

EN RÉSUMÉ
✅ Le ‘foie chargé’ n’est pas une pathologie à part entière. Lors d’une atteinte hépatique avérée, il est important d’en rechercher la cause et d’apporter un traitement adapté plutôt qu’un sirop ou une poudre aux mille vertus (à moins que l’efficacité ait été prouvée scientifiquement).

MYTHE 3 -
Le concentré contient trop d’amidon !

Il y a actuellement une forte tendance à nourrir les chevaux avec des rations ‘sans sucres’, ou ‘sans céréales’, ce qui n’est pas toujours justifié !
Certes, un cheval au repos peut couvrir ses besoins énergétiques uniquement grâce aux fourrages (qui peuvent d’ailleurs être très riches en sucres). Cependant, lorsque les dépenses énergétiques liées au travail, à la croissance ou à la lactation augmentent fortement, le fourrage ne suffit plus. C’est pourquoi il est souvent nécessaire d’avoir recours à des matières premières plus concentrées en énergie.

Parmi elles, les céréales occupent une place de choix (avec les matières grasses).
En effet, elles contiennent un glucide complexe, l’amidon, qui est scindé en molécules de glucose dans l’intestin grêle. Une fois absorbées dans le sang, ces molécules sont transportées vers le foie et les muscles, où elles sont stockées sous forme de glycogène, un glucide complexe de réserve utilisé par les animaux pour stocker de l’énergie (au même titre que l’amidon chez les végétaux).
Ainsi, le glycogène mis en réserve peut être mobilisé ultérieurement et rapidement, afin de produire de l’énergie durant un exercice soutenu par exemple. Il contribue ainsi à prévenir l’apparition d’une hypoglycémie durant l’effort, qui pourrait être à l’origine d’une fatigue subite du cheval.

Par conséquent, même si les fourrages ou d’autres sources de fibres contribuent également à la constitution des réserves en glycogène (via la production d’acide propionique issu de la fermentation des fibres par la flore intestinale, qui est ensuite converti en glucose par le foie), l’amidon reste une source énergétique de choix pour la synthèse du glycogène chez les chevaux ayant des besoins énergétiques augmentés.

⚠️ Néanmoins, l’ingestion d’amidon étant susceptible de perturber la santé des chevaux, il est important de raisonner la quantité distribuée au cours d’un repas.
Pour un cheval en bonne santé, nous recommandons de ne pas dépasser 100g d’amidon /100 kg de poids vif et par repas (soit 500g d’amidon par repas pour un cheval de 500 kg). Ces quantités peuvent être revues à la baisse, lors de problématiques de santé.
Il est donc inutile de se baser sur la quantité d’amidon par kg d’aliment : c’est dans tous les cas la quantité maximale d’amidon par kilo de poids vif et par repas qui compte !

Par ailleurs, la qualité de l’amidon diffère en fonction des céréales et de leurs formes d’apport (céréales aplaties, floconnées, etc.). Or, cela aura un impact sur la manière dont l’amidon sera digéré dans l’intestin grêle mais aussi fermenté dans l’estomac des chevaux. Par exemple, le floconnage des céréales augmente la digestibilité de l’amidon mais également son caractère fermentescible dans l’estomac.
Nous en parlons dans le MYTHE N°5.

EN RÉSUMÉ
✅ Les besoins énergétiques du cheval (athlète) sont jusqu’à deux fois supérieurs à ceux du cheval au repos, le recours à un concentré composé de céréales de qualité est parfois incontournable.

MYTHE 4 -
À l’effort : Plus de protéines !

Bien que les besoins en protéines du cheval croissent légèrement avec l’augmentation de la charge de travail (ou lors du débourrage ou après une convalescence), ils sont généralement associés au renouvellement musculaire (construction, dégradation et reconstruction) et dus à une perte d’azote par la transpiration.
⚠️ Les protéines ne sont pas un ‘carburant’ souhaitable pour l’effort, car pour qu’elles puissent être métabolisées en ‘carburant’ (adénosine triphosphate - ATP), utilisable par les muscles, le composant azoté des protéines doit être éliminé (et excrété dans l’urine, ce qui nécessite de l’eau et engendre donc un risque de déshydratation). Un processus pas terriblement efficace sur le plan énergétique. Pendant ce temps, le glucose et les graisses sont beaucoup plus facilement métabolisés pour servir de carburant.

Nous avons évoqué l’excès de l’apport protéique ci-dessus ( MYTHE N°2), et plutôt que de privilégier l’apport quantitatif, il vaut mieux opter pour une source de protéines de qualité. C’est-à-dire : les protéines à haute valeur nutritionnelle pour le cheval présentent notamment des teneurs élevées en protéines digestibles (MADC) et en lysine par rapport aux matières azotées totales (MAT).
C’est le cas du tourteau de soja (non OGM) que nous utilisons dans nos aliments et dans nos suppléments nutritionnels (tourteau de tournesol à éviter).

Par conséquent, si la ration est composée d’un fourrage de qualité correctement pourvu en protéines (8 à 10% de la matières sèche), l’augmentation importante de la teneur en protéines dans le concentré n’est pas conseillée chez le cheval athlète d’âge moyen, en bonne santé et dont la musculature est satisfaisante.

EN RÉSUMÉ
Les protéines ne sont pas une source d’énergie pour le cheval ! Choisissez un concentré constitué de sources protéiques de qualité : tel le tourteau de soja.
✅ Le foin restant la base de l’alimentation du cheval, assurez-vous de lui en procurer au moins 1-2 kg par 100 kg de poids vif (soit 10 kg de foin environ pour un cheval de 500 kg). Par ailleurs, le foin peut être analysé pour connaître sa composition et notamment ses apports protéiques.

⏩ En savoir plus sur les protéines dans l'alimentation du cheval.

MYTHE 5 -
Ration de floconnés, cheval en bonne santé !

En nutrition humaine, les ‘bienfaits’ pour la santé des céréales modifiées (mueslis, flocons de céréales) sont depuis longtemps soutenus par des messages de marketing puissants aux informations trompeuses. Des études très récentes reconfirment les effets néfastes de la consommation en grande quantité des céréales modifiées (dont les flocons de céréales !) sur la santé. Il en est de même pour les chevaux !

Certes les flocons ‘embellissent’ les aliments pour chevaux, et rassurent les propriétaires qui pensent voir tout ce que contient l’aliment. Néanmoins, la majorité des aliments floconnés contiennent des granulés... cachés au milieu des flocons !

Le floconnage est un procédé de traitement thermomécanique sous atmosphère humide qui augmente significativement la digestibilité et donc l’index glycémique des céréales. Tout comme les flocons, la mélasse, sous-produit du sucre fréquemment utilisée pour former les granulés et améliorer l’appétence de la ration, va d’ailleurs elle aussi augmenter l’index glycémique de la ration.
Ainsi, une ration présentant un index glycémique élevé est susceptible d’entraîner des perturbations métaboliques et digestives avec des conséquences plus ou moins graves à court comme à long terme.

⚠️ L’excès de flocons favorise l’embonpoint, le développement d’ulcères gastriques, les troubles du comportement, les troubles musculaires, les troubles métaboliques, etc.
L’excès de flocons favorise également le développement des problèmes ostéo-articulaires chez les jeunes. Par conséquent, même si « c’est la dose qui fait le poison », leur utilisation à l’élevage est à proscrire aussi bien chez les poulinières gestantes que sur les jeunes en croissance.

EN RÉSUMÉ
Les excès de flocons sont dangereux pour les chevaux. Ils doivent être distribués avec parcimonie et pour un usage spécifique (type courses).

Mais aussi, Les floconnés dans l'alimentation du cheval, bons ou mauvais?

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Pôle Santé Reverdy, Département Recherche & Développement, Juvigny-les-Vallées, France